Saint Epondyle : Avec l’autoédition je m’adresse aux lecteurs qui me suivent déjà, via le blog

Saint Epondyle propose pour la Rentrée des indés, Cyberpunk Reality, un petit essai qui observe le monde à travers le prisme de la science-fiction cyberpunk.

Parlons d’abord de votre livre. Pouvez-vous le résumer en quelques phrases ?

Cyberpunk Reality est un petit essai qui jette sur le monde un regard particulier, à travers le prisme de la science-fiction cyberpunk. Sur cinq chapitres et quatre-vingt-dix pages, j’ai voulu montrer comment notre univers contemporain tend vers les mondes décrits par les auteurs de ce genre. Urbanisation à outrance, technologies incontrôlées et intrusives, corpocratie et illusions de contrôle sont les thématiques essentielles du genre, thématiques qui gagnent en actualité un peu plus chaque semaine. Mon livre cherche à mettre cette tendance en relief, c’est un essai métafictionnel à dimension politique.

Quelle a été votre source d’inspiration, l’évènement qui vous a poussé à écrire ce livre ?

Au départ, je ne suis pas gros connaisseur de la matière cyberpunk (même si j’ai toujours été passionné de SF). J’ai donc dû me documenter sur le genre, relisant notamment William Gibson et Philip K. Dick, mais aussi en revoyant d’excellents films comme ceux des Wachowski. Outre les références classiques, j’ai aussi essayé d’apporter une touche actuelle en citant les productions récentes qui apportent quelque-chose à ce registre très rabâché (notamment le film Her, ou dans le domaine des jeux vidéo). Toute inspiration est bonne tant qu’elle raconte une histoire.

D’autre part, j’ai beaucoup lu d’articles de presse et de documents pouvant m’apporter matière à réflexion sur la marche du monde. En matière de transhumanisme et de technologie les articles ne manquent pas car ces sujets sont dans l’air du temps. Mais pour évoquer le règne de la virtualité (de l’irréel), j’ai dû creuser vers des sources plus détournées, peut-être plus philosophiques.

Une bonne raison de lire votre livre ?

Malgré la diversité des thématiques soulevées, j’ai essayé de rester synthétique et compréhensible par tous. Au-delà du discours politico-philosophique qui intéressera les passionnés, Cyberpunk Reality est aussi un bon moyen de découvrir l’un des les genres les plus riches de la science-fiction. Le livre peut donc se lire dans les deux sens : les afficionados y verront un parallèle avec le monde d’aujourd’hui et les néophytes pourront se servir de l’actualité pour prendre contact avec ce genre particulier.

Enfin je vends mon livre par moi-même, petit artisan sur le vaste web. En le proposant à la vente, j’offre à chacun la possibilité de me soutenir en tant qu’auteur et blogueur indépendant. Pour vous permettre de juger sur pièce, le livre est publié sur mon blog en texte intégral. Je voudrais que son achat soit un acte volontaire et consenti librement. À chacun de décider s’il veut l’acheter ou pas, avant ou après l’avoir lu.

Pourquoi avez-vous choisi l’autoédition ? Avez-vous déjà publié par ailleurs chez un éditeur ?

Je suis blogueur, le choix de l’autoédition (en passant par des outils web de publication numérique et d’impression à la demande) m’est donc venu naturellement. Plus naturellement en tous cas que d’écrire un livre entier avant de le soumettre à des maisons d’édition. Comme je suis issu de la culture numérique, je n’ai jamais envisagé d’écrire sans pouvoir publier à ma guise sur le réseau et l’intervention d’un éditeur m’aurait paru une ingérence difficilement supportable. Avec l’autoédition je m’adresse aux lecteurs qui me suivent déjà, via le blog. Il n’y a pas foule mais je m’adresse directement à chacun. Et comme justement mon public est restreint, ça permet d’engager la discussion avec tous les lecteurs qui le souhaitent.

Je ne conçois pas le livre très différemment d’une publication sur le blog. Il apporte une reconnaissance bien supérieure mais la démarche s’inscrit dans la même continuité, dans un autre format. Faire un livre n’a jamais été un rêve avant d’être un projet tangible : comme je suis graphiste j’ai pu concevoir la maquette et la couverture par moi-même. Mais c’est parce que je pouvais le faire, et grâce aux technologies d’impression à la demande, que j’en eu l’idée. Si j’avais été designer sonore j’aurais sans doute fait un podcast. La forme m’importe moins que le fond.

Parlons de vous : depuis quand écrivez-vous ? Comment vous est venue l’envie d’écrire ?

J’ai commencé il y a une dizaine d’années. Au départ administrateur d’un forum de discussion sur Internet, j’y ai commencé à écrire des critiques de films et des histoires courtes, essentiellement dans des jeux d’écritures à plusieurs mains. En créant Cosmo Orbüs (mon blog) il y a cinq ans, je me suis découvert un vrai goût pour l’écriture sur les cultures imaginaires. Cette année, c’est cette même passion pour la métafiction qui m’a poussé à écrire et publier mon premier livre. Écrire un texte aussi long qui soit articulé et cohérent était une vraie nouveauté, car je n’ai jamais conçu l’écriture qu’autour du format « article de blog » d’un petit millier de mots en moyenne.

Avec le temps, j’ai beaucoup travaillé ma plume et je me suis essayé à la fiction. J’écris de petits tableaux inspirés des univers que j’apprécie, travaillant particulièrement l’ambiance pour essayer de brosser des portraits de personnages « classiques » de la littérature de genre. Pour moi, les variations et interprétations de mythes collectifs sont à la base des littératures de l’Imaginaire, alors je m’essaye à représenter ma propre vision du vampire, ou à raconter un conte de Noël en le détournant sur le registre de l’horreur… Quant à écrire un roman, étant donné que je suis un mauvais scénariste et que je n’ai pas tant d’imagination que je le voudrais, je laisse ça aux autres.

Avez-vous des rituels d’écriture ? Comment cherchez-vous l’inspiration pour vos livres ?

J’écris toujours absolument seul. Je fais partie de cette génération pour qui la concentration est interdite plus d’un quart d’heure de suite, et j’ai de vrais troubles de l’attention. Rester centré sur le texte est un exercice difficile, auquel je n’arrive à me contraindre que lorsque je suis seul.

Mon rituel d’écriture est donc plutôt simple. Lors de l’avant dernière pleine-lune avant le solstice d’hiver, j’asperge la table de pierre mégalithique de mon quartier avec le sang de cent oisillons tombés du nid. Puis je me place, nu, en croix au centre du pentacle en hurlant des injures à l’astre solaire pour le forcer à se coucher. En fonction du temps de nuit supplémentaire que j’ai réussi à lui arracher, Mère Lune me récompense en m’accordant la Sainte Inspiration jusqu’au prochain matin. Les autres jours, je me cloître chez moi avec de la musique d’ambiance (je commence à en avoir une sacré collection) et je tape frénétiquement mon clavier jusqu’à ce que l’alignement des pixels noirs sur la surface blanche me paraisse pleine de sens.

L’inspiration, au sens « avoir des idées », n’a jamais été un problème pour moi car je déborde littéralement de choses sur lesquelles je voudrais disserter. Faute de temps, et parce que la plupart ne vaut pas qu’on s’y attarde, j’en emplis mes petits carnets pour (un jour (peut-être)) les utiliser. Par contre, l’inspiration au sens « être capable d’écrire » est une chose incontrôlable. On peut plus ou moins se forcer, mais les fulgurances comme les blocages sont souvent aussi inexplicables que les thématiques qui nous poussent en avant tel ou tel jour. Plutôt que d’enrager lorsque ça ne sort pas, le mieux est souvent de faire autre chose.

Quels sont vos auteurs favoris, ceux qui vous inspirent ou que vous considérez comme vos modèles ?

Je voue un culte à Alain Damasio, qui est à mon sens l’auteur français le plus passionnant, imaginatif et exigeant de notre époque. Ses romans et nouvelles mêlent discours et engagement philosophique, sens du récit, innovation littéraire et exigence poétique. C’est l’un des rares auteurs (et particulièrement dans les littératures de l’Imaginaire) à inventer quelque-chose de neuf. Je crois que mon livre irradie (ne serait-ce que par les nombreuses citations) mon admiration pour ce monsieur.

Dans les classiques, mon allégeance va sans conteste au célèbre HP Lovecraft, moins pour ses textes en tant que tels que pour l’univers en creux qu’ils laissent entrevoir. Derrière les apparences de contes d’épouvante de série B, la littérature de Lovecraft est à l’origine du plus passionnant et métaphysique des univers étendus. C’est un rapport au monde profondément pessimiste qui remet profondément en perspective les mythes fondateurs qui portent nos civilisations.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui rêve d’écrire un livre mais n’a jamais osé se lancer ?

Mais je suis quelqu’un qui rêve d’écrire un livre ! Les deux seuls conseils que je peux donner ne viennent pas de moi : ce sont ceux que je m’applique à moi-même pour essayer de surnager dans la marée de goudron quotidienne qui prétend m’engluer dans l’inertie. Ils sont simplissimes à comprendre mais moins à appliquer.

Premier conseil : Si vous voulez écrire, écrivez. Ne vous posez aucune autre question, ni la publication, ni la réception par vos lecteurs ou ce qu’en pensera votre chère maman. Nous vivons une époque riche de distractions, n’allez pas chercher de conseils sur Internet, ni créer de profils sur les réseaux sociaux. Tout ceci arrivera plus tard. N’allez pas vous faire lire par qui que ce soit, ne vous relisez même pas vous-même si cela vous bloque. Mais si vous vous demandez comment devenir écrivain, la réponse est « en écrivant ».

Le deuxième conseil est peut-être plus précieux. Je le tiens de Neil Gaiman, cité sur son blog par Neil Jomunsi : « Finish something. » Tout le monde est capable de commencer un roman ici et maintenant. D’ailleurs, tout le monde le fait. Ce qui relève d’une prouesse bien supérieure, c’est d’arriver à le boucler. Il sera peut-être mauvais, pas original, il n’aura peut-être jamais de succès, ni même de vrais lecteurs. Mais il ne moisira plus, inachevé, au fond d’un disque dur. Vous aurez largement le temps de douter, voire détester votre propre texte pendant le long chemin vers sa conclusion, c’est pourquoi le terminer vous demandera de l’endurance et de la discipline, surtout lorsque d’autres envies et d’autres idées vous titillerons les synapses jour et nuit. Il est très facile de se laisser aller au découragement ou simplement de reporter son enthousiasme ailleurs. Mais je préfère à quatre introductions sans suite un livre terminé. Et puis, bon ou mauvais, le deuxième sera meilleur.

Cyberpunk Reality est disponible sur le site de Saint Epondyle, en version numérique, à 2,99 €

À PROPOS DE LA RENTRÉE DES INDÉS :

Pour la première fois cette année, en écho à la rentrée littéraire orchestrée par les éditeurs, 40 auteurs autoédités se réunissent pour s’offrir une visibilité inédite pendant tout le mois d’octobre et toucher de nouveaux lecteurs.

Épaulés par Iggybook.com (la plateforme des auteurs indépendants), Actualitte.com (le magazine des univers du livre) et Babelio.com (la première communauté de lecteurs francophones), ils lancent LA RENTRÉE DES INDÉS 2015.

Découvrez-les sur le site de la Rentrée des indés !


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